Grand débat - relevé des échanges

Grand débat organisé à La Chapelle-Saint-Mesmin (45380)

Vendredi 8 mars 2018

Réunissant près de 100 personnes, ce débat était organisé par un groupe de citoyens engagés de la chapelle. Plusieurs témoignages ont abordé les questions de fiscalité, démocratie, services publics et transition écologique. 


Fiscalité et dépenses publiques

La fiscalité n'est plus adaptée à notre société. Elle pèse à l'excès sur les classes moyennes qui n'ont pas les moyens de pratiquer l'évasion fiscale et finit par pousser les gens aux extrêmes politiques. C'est la paupérisation de la classe moyenne entre les deux guerres qui a conduit l'Europe à la seconde guerre mondiale. Et c'est le souvenir de la crise de 29 et de ses conséquences qui ont conduit les occidentaux à construire un état providence. Mais...
Inquiétudes :
  • le poids de la dette, qui charge chaque enfant de 40 000 euros dès sa naissance. Ce souci ne semble pas présent dans le grand débat, et n'est pas évoqué par le mouvement des gilets jaunes. On voudrait donner beaucoup à nos enfants et petits-enfants. On imagine qu'en obtenant plus du gouvernement, on n’aura plus les moyens d'aider nos enfants : c'est l'inverse. En exigeant plus de dividendes de l'état, on alourdit sa dette, et on charge l'avenir de notre descendance, qui nous le reprochera.
  • Le système social a été mis en place en 1945 avec 5 000 chômeurs. Il y en a mille fois plus actuellement, il ne peut pas tenir.
  • La France n'arrive pas à maîtriser sa dépense : on emprunte 80 milliards d'euros, l'Allemagne 4 milliards seulement.
  • Le coût prévisible de la dépendance, et la retraite à payer dans une population vieillissante. On ne pourra pas augmenter les impôts sans fin, il faudra réduire nos dépenses. Mais cela ne pourra se faire qu'avec pédagogie, en expliquant sans cesse à quoi sert l'impôt, quelles sont les dépenses, d'où viennent les revenus et pourquoi il faut réduire notre train de vie. Éduquer les citoyens à la maîtrise de leur budget : doit-on se payer tout de suite l'iPhone à 1 000 euros, exiger de la nation qu'elle nous donne les moyens pour réaliser immédiatement un tel achat ? Non !
  • La jeunesse ne se sent pas concernée par ce débat, il n'y a que des seniors dans la salle
  • Une lycéenne réagit et exprime son inquiétude à l'idée de ne pas avoir de retraite avant... un âge certain.
Choqués par :
  • l'obsolescence programmée ou culturelle : il faut acheter, consommer pour exister. Notre enfance a été heureuse, celle des consommateurs gavés peut-elle l'être ? D'autant qu'elle génère une crispation du fait des écarts de revenus et des frustrations de ne pas pouvoir acheter tout ce qui nous est proposé.
  • N'importe quel employé bénéficiant d'une voiture de fonction doit la rendre quand il quitte l'entreprise, et devra s'acheter sa propre voiture. Il est inadmissible que les présidents, ministres, etc. qui quittent leur fonction bénéficient encore d'une voiture de fonction.
  • Le temps de la royauté est terminé, et ses privilèges aussi. Il faut abolir tous les privilèges dont disposent les présidents, ministres, sénateurs, députés et revoir leurs indemnités, considérables, à la baisse. Nous avons 2 500 milliards de dettes !
  • L'Europe qui n'a aucune solidarité ni politique commune en matière de fiscalité. Chaque pays tente de tirer le meilleur parti de ses avantages fiscaux.
Propositions :
  • fiscalité plus élevée sur les produits non vitaux
  • lutter contre l'évasion fiscale
  • raboter les avantages fiscaux hérités de situations professionnelles anciennes et qui ne sont plus justifiées (ex. journalistes)
  • plafonner les salaires de la fonction publique à celui du président de la république
  • accéder aux comptes détaillés et lisibles des budgets de la nation, partant du principe que les citoyens gèrent leur propre budget et sont suffisamment matures pour analyser les budgets de leurs associations. Afficher sur internet tous les postes de la dépense publique. Les citoyens doivent recevoir une meilleure information sur les recettes et les dépenses de l’État.
  • L’État a des missions régaliennes (police, justice, armée) et il offre une protection à tous, et pas seulement aux seuls salariés. Il faut basculer les cotisations sociales et familiales de cette protection (sécurité sociale, prestations familiales), qui ne sont payées que par les entreprises et les salariés, vers l'impôt général. Cela réduira la taxe pesant sur le travail et les entreprises, et leur dégagera des marges. En contrepartie, il faut trouver une assiette plus large pour récolter l'argent. La CSG semble le plus juste, car plus on gagne, plus on paye contrairement à la TVA (plus on consomme, plus on paye).
  • Est-il opportun de conserver les avantages familiaux liés au troisième enfant pour les hauts revenus ?
  • La TVA devrait être baissée pour les produits de première nécessité. Il faudrait revoir ce panier fiscal.
  • Adapter le prix au salaire : après tout, un président peut payer sa baguette de pain plus cher qu'un smicard.
  • Réduire le nombre de députés
  • Chaque citoyen doit payer ses impôts en France, avoir ses comptes bancaires en France et l'Etat doit également emprunter sur le marché français et ne pas enrichir les banques étrangères par les intérêts que nous payons avec nos impôts.
  • Réduire les dépenses publiques. La France disperse un budget de 50 milliards sur 1 200 agences gouvernementales. Elles emploient 40 000 personnes, mais quel est leur rôle une fois la mission terminée ? Regardons à l'étranger : l'Angleterre et l'Allemagne font le même travail avec 300 agences. En résumé : regarder quelles dépenses peuvent être réduites tout en améliorant le service.
  • Appliquer véritablement les décisions des Cours des comptes nationale et régionales.
  • Chaque citoyen doit payer un minimum d'impôt, ou un impôt symbolique, 1 ou 10 €, pour se sentir responsable de la nation
  • L'impôt par palier : il faut des paliers plus élevés pour les hauts-revenus.
  • Le mécanisme de palier fiscal est injuste, quand il fait perdre pour un euro de revenu supplémentaire beaucoup plus que l'euro gagné.
  • La solidarité nationale impose aussi des devoirs. Autrefois, on perdait le bénéfice d'un concours de la fonction publique si on refusait trois propositions de postes. Aujourd'hui un chômeur peut refuser trois propositions d'emplois et conserver le bénéfice de ses indemnités. Ce n'est pas acceptable.
  • L'absentéisme des députés n'est plus tolérable : on observe fréquemment 75% d'absents. En entreprise, ces personnes seraient licenciées. On ne doit plus verser leur indemnité parlementaire aux absentéistes.
  • En attendant une intégration fiscale plus grande en Europe, les pays qui abusent du dumping fiscal doivent contribuer plus fortement au budget européen. La France, deuxième contributeur, se fait spolier par le Luxembourg qui capte les bénéfices de nos entreprises. Ce n'est pas normal.
  • La taxe GAFA est une bonne chose. L'Irlande, sommée par l'Europe de réclamer son dû au GAFA. Si elle ne veut pas le faire, on peut estimer qu'elle a les moyens de contribuer davantage au budget européen.
Réactions :
  • La part du budget consacré à la dépense de nos dirigeants est de 1/1000. En admettant qu'on rabote leurs avantages de 50%, nous n'aurons pratiquement rien économisé. Quand on consulte le site du grand débat et les propositions de secteurs dont on pourrait diminuer les budgets, on répond spontanément « non, je ne peux pas réduire les dépenses » sur tous les postes. En fait, c'est la réorganisation de l’État et des collectivités qu'il faut conduire : éliminer les doublons, moderniser, numériser, redéfinir les périmètres d'actions des collectivités et mener un vrai travail de fond pour identifier les économies.
  • Je suis gênée par cette discussion centrée sur la réduction des services publics. L’État dépense et fait des choix dans d'autres domaines que le service public, lorsqu'il investit dans des entreprises polluantes telles que des forages de charbon.

La démocratie

Thème écarté par les participants, il revient en force en fin de réunion avec :
La citoyenneté c'est la solidarité et l'humanité, se parler, se côtoyer et regarder autour de soi.
Inquiétudes :
  • qu'est-ce qu'être citoyen aujourd'hui ? L'école ne peut pas se charger de faire l'éducation du citoyen. L'état, les médias, doivent s'interroger sur la désaffection des jeunes de la politique.
  • Avec 65 millions de citoyens, comment peut-on imaginer se passer de la démocratie représentative ? Ce n'est pas internet et le brouhaha de propositions qui peuvent gouverner un pays.
  • Il y a eu trop d'élections où le citoyen qui faisait l'effort de comparer les programmes et de choisir un candidat ne voyait aucun résultat conforme à ses espérances. Du temps gaspillé à étudier et comparer les programmes. Normal qu'on ne veuille plus voter.


Propositions :
  • rendre le vote obligatoire
  • prendre en compte le vote blanc
  • enquêter sur les raisons du vote blanc et corriger le tir
  • trouver un juste milieu entre le référendum d'initiative populaire de la constitution et celui que propose les gilets jaunes
  • ne pas voter pour un candidat, mais donner une note à chaque candidat.
  • Pour certaines lois, expliquer clairement les tenants et aboutissants, puis tirer au sort des citoyens députés, leur laisser le temps d'examiner à fond la proposition et les faire voter la loi.


Réactions :
  • espérer que ceux qui votent blanc s'unissent sous la bannière d'un candidat alternatif est illusoire : les lobbys politiques en place lutteront contre l'émergence de candidats issus de la société ; les déçus de la politique s'éparpilleront sur de multiples candidatures
  • l'irruption de la société dans le jeu politique établi montre cette soif de démocratie, il faut y répondre. Vouloir le RIC montre bien que les gens veulent voter, mais sur des questions qui les intéressent.

État et services publics

Témoignages et réclamations :
  • Père d'une fille handicapée mentale de 23 ans, je ne trouve pas de structure pour adulte disposant de place dans le Loiret. Elle reste donc temporairement dans son IME, ce qui bloque l'entrée d'un jeune de 12 ans. Pourquoi ? Parce que les structures adaptées ont été mises en place à une époque où l'espérance de vie d'un handicapé mental était de 30 ans, alors qu'elle est aujourd'hui de 60 ans. Mais les structures n'ont pas évolué. Sous la responsabilité des départements, la couverture proposée aux handicapés est inégale sur tout le territoire. Les départements qui sont bien dotés ne veulent pas accueillir des résidents venant d'un autre département si celui-ci ne les rembourse pas. On a mis en place une journée de solidarité au lundi de Pentecôte pour les personnes âgées et les handicapés : où va cet argent ?
  • L'administration est (mal) organisée en mille-feuilles. Renvois incohérents entre différents bâtiments de l'agglomération pour obtenir un rendez-vous. Comment font ceux qui travaillent ou ne peuvent pas facilement se déplacer ?
  • L'organisation territoriale est « fouillis » : qui décide de quoi, qui paye quoi ?
  • La prorogation des cartes d'identité est une décision française qui n'est pas comprise par les pays étrangers. Il faut donc utiliser son passeport. Mais le passeport est immobilisé plusieurs semaines quand on demande un visa. On se retrouve donc sans papier d'identité reconnu à l'étranger le temps de se faire établir un visa pour un pays donné, alors qu'on a besoin de voyager dans un autre où la carte d'identité suffirait.
Inquiétudes :
  • Les services publics se numérisent, mais rien n'est fait pour ceux qui manquent d'argent, sont âgés ou ont des difficultés à manipuler internet
  • On voudrait tout rationaliser avec internet, mais où est la solidarité, l'humanité ?
  • Passer à côté du numérique est le nouvel analphabétisme contemporain. On ne doit pas abandonner une fraction de la population.
  • La désertification médicale conduit à une injustice devant la santé : les études montrent que les personnes venant de région sous dotées arrivent avec des pathologies plus lourdes quand elles viennent se faire soigner
  • Les nouvelles professions médicales (assistant médical pour prendre la tension par exemple) ne servent qu'à augmenter la productivité du médecin mais ne fluidifie pas le parcours de santé, on est loin du médecin de famille qu'on a connu autrefois.
  • Les MSP regroupent des praticiens déjà en place, elles n'attirent personne de plus.
Propositions :
  • dans le Pas-de-Calais, les enfants handicapés sont accueillis en Belgique, qui en a fait une activité lucrative. Pourquoi ? Parce que les normes sont moins contraignantes et qu'il est intéressant d'investir dans ce domaine. Revoyons nos normes : à quoi servent-elles si elles empêchent d'accueillir chez nous nos enfants handicapés ?
  • La Lettonie est le pays qui a l'administration la plus numérisée d'Europe : c'est donc possible, mais il faut des espaces d'accueil en mairie pour ceux qui ont des difficultés d'accès au numérique.
  • La Poste, dont l'activité traditionnelle diminue, pourrait offrir un service public du numérique.
  • Regrouper les services publics, améliorer l'accueil
  • Réorganiser la médecine pour une meilleure couverture territoriale : faire une médecine itinérante, avec des missions de un ou deux jours en territoire déserté
  • Assez des réformes de santé qui se succèdent sans avoir le temps d'être appliquées ! Laissons le temps au temps.
  • L’État doit s'imposer dans l'organisation de la santé

Transition écologique

Le monde court à sa perte : disparition des oiseaux, des insectes, empoisonnement des océans et des sols avec le plastique, réchauffement dû à l'effet de serre. Il est urgent d'agir, même si ça coûte de l'argent.
Inquiétudes :
  • la voiture électrique est un leurre, qui consomme plus de carbone à la fabrication. Elle ne devient vertueuse qu’à 80 000 km. Quelle voiture de ville atteindra ce kilométrage ?
  • un responsable haut placé d'une entreprise de construction automobile avouait que la gestion des batteries serait le prochain scandale sanitaire mondial
  • si on passait au tout électrique pour ne plus polluer, on devrait ouvrir 4 tranches nucléaires en plus
  • les normes sont bonnes mais aucun contrôle ne permet de s'assurer qu'elles sont respectées, comme dans l'usage de plastique au bisphénol
  • attention aux incohérences d'une politique écologique mal réfléchie : l'Allemagne a un Kwh quatre fois plus polluant que la France depuis qu'elle a fermé son parc nucléaire, car elle a dû ouvrir des centrales thermiques à la lignite !
  • le discours officiel du gouvernement est contradictoire avec les nécessités écologiques : promouvoir le diesel puis le taxer pour le faire disparaître
  • les lobbys sont très efficaces pour étouffer les initiatives de diversification énergétique, comme le GPL et l'hydrogène.
Propositions :
  • Les citoyens doivent faire pression sur les politiques pour écouter les chercheurs. Il y a plein d'idées qui émergent pour contrer le réchauffement.
  • Ne pas laisser la terre à nu entre deux cultures, mais planter des radis ou des prairies, la nature peut nous aider à fixer le carbone
  • Interdire les filets dérivants
  • Monter des bassins de dépollution comme à Brie-sur-Marne.
  • Les gilets jaunes et l'écolière suédoise nous ouvrent la voie : inventer une veste bleue (océan) ou verte (nature), avec un logo universel en anglais (save the planet) pour que chaque jogger ou promeneur témoigne de son engagement et pousse les politiques à agir.
  • Dissuader l'usage du plastique, en taxant les distributeurs qui l'utilisent, ou en imposant un mécanisme de consigne des emballages.
  • Interdire totalement le plastique et utiliser verre, carton, papier : soit les industriels savent recycler ce qu'ils vendent, soit la vente est interdite
  • Inciter et faciliter le nettoyage citoyen des chemins en augmentant le nombre de poubelles
  • Uniformiser les règles de tri entre collectivités et territoires en France
  • Monter un blablacar pour les trajets professionnels
  • Inciter l'investissement vert (travaux sur bactérie mangeuse de plastique par exemple) et fortement dissuader l'investissement dans les secteurs polluants.
  • Diversifier les sources énergétiques et en particulier hydrogène et GPL
  • Reprendre les 4 points des ONG : supprimer les avantages fiscaux accordés aux activités polluantes comme le transport aérien, le fret maritime sur gros cargos, le transport routier ; obliger à réhabiliter les passoires énergétiques ou les sortir du marché locatif, d'autant qu'elles appauvrissent les personnes déjà en difficulté ; interdire les voitures très polluantes ; supprimer les subventions accordées aux investisseurs polluants (mines de charbon) et favoriser les transports durables.
  • Que puis-je faire individuellement ? Parabole du colibri de Pierre Rabhi. Je peux marcher, prendre mon vélo, réutiliser mon eau de lavage, manger des fruits et légumes de saison, et privilégier les circuits courts et enfin éduquer mes enfants (durée des douches… )
  • Généraliser le gestionnaire d'énergie Linky qui permet de maîtriser sa consommation électrique
  • Construire des immeubles à bilan d'énergie positive
  • Obliger les établissements publics à s'équiper de panneaux solaires

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